Monde. La FIFA doit publier son rapport sur l’indemnisation des travailleurs victimes d’abus en amont de la Coupe du monde au Qatar

La FIFA doit immédiatement rendre publique une étude qu’elle a reçue il y a cinq mois et qui porte sur ses responsabilités en matière de droits humains à l’égard des travailleurs lésés lors de l’organisation de la Coupe du monde de football 2022 au Qatar, et doit honorer ses obligations, a déclaré Amnesty International jeudi 9 mai.

Amnesty International croit savoir qu’une étude indépendante, annoncée lors du congrès de la FIFA au début de l’année dernière, et dont les conclusions ont été approuvées par le Conseil de la FIFA en mars, reconnaît le devoir de la FIFA de remédier à un grand nombre de violations subies par des centaines de milliers de travailleurs migrants ayant aidé le Qatar à accueillir la Coupe du monde 2022.

« Avant son congrès annuel, qui aura lieu la semaine prochaine, la FIFA devrait rendre publique l’étude qu’elle a commandée sur ses responsabilités en matière de réparation des violations des droits humains liées à la Coupe du monde 2022, et répondre positivement et rapidement à ses recommandations. La FIFA a reçu cette étude il y a plusieurs mois, mais n’a toujours pas révélé ses conclusions, ni agi en conséquence », a déclaré Steve Cockburn, responsable du programme Droits du travail et Sport d’Amnesty International. 

Ce retard ne fait que prolonger la souffrance des familles qui ont perdu des êtres chers et des travailleurs qui ont été victimes d’abus lors de l’organisation de l’événement phare de la FIFA

Steve Cockburn, responsable du programme Droits du travail et Sport d’Amnesty International

« Ce retard ne fait que prolonger la souffrance des familles qui ont perdu des êtres chers et des travailleurs qui ont été victimes d’abus lors de l’organisation de l’événement phare de la FIFA. La FIFA ne peut pas effacer cette douleur, mais elle peut établir un plan clair afin que justice soit rendue, et allouer une partie de ses vastes ressources à la réparation des préjudices auxquels elle a contribué. »

« Il est possible que la lecture de ce rapport mette la FIFA mal à l’aise, mais la grande majorité du public l’encourage à agir et il n’y a aucune raison de différer ces actes. Un engagement à remédier aux abus liés à la dernière Coupe du monde constituerait une étape essentielle pour que la FIFA assume enfin ses responsabilités en matière de droits humains, et pourrait changer la vie des travailleurs et de leurs familles. »

Des centaines de milliers de travailleurs migrants ont terriblement souffert dans le cadre de leur travail en vue de la tenue de la Coupe du monde de la FIFA 2022 au Qatar. La chaleur extrême et des conditions de travail dangereuses ont également entraîné la mort de nombreux travailleurs, les autorités qatariennes n’ayant pas enquêté sur les décès de milliers de travailleurs à travers le pays au cours de la décennie ayant précédé le tournoi.

D’autres travailleurs ayant payé des frais de recrutement exorbitants pour obtenir un emploi ont ensuite été escroqués et n’ont pas reçu le salaire promis, et ont connu des conditions de travail épouvantables ou d’autres violations, notamment le travail forcé. Cette situation a laissé de nombreux travailleurs anéantis sur le plan financier et émotionnel, incapables de reconstruire leur vie.

En attribuant l’organisation du tournoi au Qatar en 2010, sans s’assurer au préalable que des garanties suffisantes étaient en place pour protéger les droits humains, la FIFA a contribué à plus d’une décennie de violations auxquelles il n’a pas été remédié. Ces dernières années, la FIFA a réformé ses statuts et ses lignes directrices afin de mieux reconnaître ses obligations en matière de droits humains, mais de sérieux doutes subsistent quant à son engagement à les respecter.

La FIFA étudie actuellement l’attribution des droits d’organisation des Coupes du monde masculines de 2030 et 2034. Une candidature conjointe de l’Espagne, du Portugal et du Maroc est la seule soumise pour 2030, et l’Arabie saoudite est la seule candidate pour 2034.

« La FIFA ne peut pas se contenter de passer à d’autres compétitions en laissant des souffrances dans son sillage, d’autant plus que l’occasion de redresser la situation est à portée de main. Il est grand temps que la FIFA rende cette analyse publique, qu’elle se penche sur les abus liés à la dernière Coupe du monde et qu’elle agisse enfin en faveur des travailleurs qui ont rendu la compétition possible », a déclaré Steve Cockburn.

Complément d’information

Le congrès annuel de la FIFA se tiendra le 17 mai à Bangkok, en Thaïlande, et il est prévu que des membres des associations de football de 211 États y assistent.

Des sondages ont montré que le public est largement favorable à ce que la FIFA mette en place un mécanisme d’indemnisation des travailleurs victimes de violations au Qatar, et à ce que les droits humains soient un élément crucial dans la sélection par la FIFA de tous les pays organisateurs. L’accès des victimes à un fonds établi par le Qatar en 2020 est semé d’embûches. Les versements sont plafonnés, et il est quasiment impossible pour les travailleurs ou les familles de faire une demande après leur retour dans leur pays d’origine.

Amnesty International et la coalition #PayUpFIFA ont fait campagne pour que la FIFA mette en place et finance son propre système d’indemnisation, et ont demandé que le Fonds d’héritage de la Coupe du monde 2022 de la FIFA soit utilisé pour réparer les abus. La Coupe du monde au Qatar a été la compétition la plus rentable de l’histoire de la FIFA, remportant 7,5 milliards de dollars.