Les membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, réunis à Genève, doivent rejeter les initiatives du gouvernement éthiopien visant à mettre un terme prématurément au mandat de la Commission internationale d’experts des droits de l’homme sur l’Éthiopie (ICHREE), qui enquête sur les crimes de guerre et les autres atteintes aux droits humains perpétrés dans le pays, a déclaré Amnesty International le 3 mars 2023.
Les actions du gouvernement éthiopien reflètent son manque d’engagement à rendre justice aux millions de personnes qui ont été victimes de graves atteintes aux droits humains
Flavia Mwangovya, directrice adjointe pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International
« Il est très inquiétant que l’Éthiopie souhaite mettre un terme au travail de l’ICHREE. Les actions du gouvernement éthiopien reflètent son manque d’engagement à rendre justice aux millions de personnes qui ont été victimes de graves atteintes aux droits humains, notamment de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, pendant le conflit dans le nord de l’Éthiopie », a déclaré Flavia Mwangovya, directrice adjointe pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.
Le mois dernier, l’Éthiopie a déclaré qu’elle allait présenter une résolution au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, dont une session est en cours, en vue de mettre un terme au mandat de l’ICHREE.
Flavia Mwangovya a déclaré : « Mettre un terme au mandat de l’ICHREE porterait atteinte à l’intégrité du Conseil. Si les membres Conseil des droits de l’homme se mettent d’accord avec le gouvernement éthiopien et votent pour mettre fin au travail de l’ICHREE, cela aura de graves conséquences pour la crédibilité du Conseil et son travail sur les graves problèmes de droits humains dans les pays du Sud. »
Amnesty International est préoccupée par la récente déclaration du vice-Premier ministre d’Éthiopie Demeke Mekonnen selon laquelle le travail de l’ICHREE pourrait saper le processus de paix dirigé par l’Union africaine et la mise en œuvre de l’accord de paix de Pretoria avec une « rhétorique incendiaire ».
Mettre un terme au mandat de l’ICHREE porterait atteinte à l’intégrité du Conseil
Flavia Mwangovya
Flavia Mwangovya a déclaré : « La déclaration du vice-Premier ministre présente un faux dilemme impliquant que la paix ne peut pas coexister avec la justice et l’obligation de rendre des comptes.
En réalité, l’ICHREE peut jouer un rôle indispensable en préparant le terrain pour un véritable processus de justice participatif, inclusif, contextualisé et respectueux des droits humains qui garantira la justice et des réparations pour toutes les victimes des atrocités commises en Éthiopie. »
« L’ICHREE doit être autorisée à mener à bien son mandat et doit pouvoir accéder à tout le pays, y compris à la région Oromia, où de nombreuses atteintes aux droits humains sont signalées. »
« Les membres du Conseil des droits de l’homme de l’ONU doivent faire savoir de manière unie et sans équivoque qu’ils rejetteront toute résolution menaçant le mandat de l’ICHREE. »
Complément d’information
En décembre 2021, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a créé l’ICHREE, chargée d’enquêter sur les allégations d’atteintes aux droits humains commises en Éthiopie depuis le début du conflit dans le nord du pays en novembre 2020. Le mandat de la Commission a été renouvelé en 2022 jusqu’en septembre 2023.
En septembre 2022, un rapport de l’ICHREE indiquait qu’il existait des motifs raisonnables de penser que toutes les parties au conflit avaient commis de graves atteintes aux droits humains et violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains, dont de nombreuses pouvant constituer des crimes de guerre, dans le nord de l’Éthiopie entre novembre 2020 et janvier 2022.
Amnesty International considère qu’il n’existe actuellement aucun mécanisme d’obligation de rendre des comptes crédible en Éthiopie et que le cadre juridique et le système judiciaire du pays ne permettront pas d’assurer pleinement la justice, la vérité et les réparations pour les graves atteintes aux droits humains commises par le passé et actuellement. Le travail de l’ICHREE est donc d’une importance cruciale pour veiller à ce que les victimes de graves crimes de droit international obtiennent justice.