République centrafricaine

Amnesty International ne prend pas position sur les questions de souveraineté ou les conflits territoriaux. Les frontières apparaissant sur cette carte sont basées sur les données géospatiales des Nations unies.
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République Centrafricaine 2023

Le droit à la liberté d’expression a été entravé. Des restrictions relatives à la liberté de réunion pacifique ont été instaurées dans le contexte de l’adoption d’une nouvelle Constitution. La situation en matière de sécurité s’est dégradée : de graves violations des droits humains et exactions ont été commises par toutes les parties au conflit armé. Quatre personnes ont été jugées par la Cour pénale spéciale pour des crimes de droit international. Les violences sexuelles ou fondées sur le genre sont restées très fréquentes. Environ 2,4 millions de personnes souffraient de l’insécurité alimentaire dans le pays.

Contexte

En janvier, le président a déclaré qu’il fallait lutter contre la corruption étant donné que les ressources publiques s’amenuisaient. En mai, le Parlement a adopté une loi de lutte contre la corruption.

En juillet, la nouvelle Constitution permettant au président de briguer un troisième mandat a été approuvée par 95 % des voix lors d’un référendum. L’opposition politique a contesté la légalité et l’équité du processus.

Les affrontements entre des groupes armés affiliés à la Coalition des patriotes pour le changement et les forces gouvernementales, aidées de leurs alliés, se sont poursuivis. En octobre, 504 992 personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays. Le Fonds monétaire international a prêté un appui financier dans le cadre d’un plan d’aide global de 191 millions de dollars des États-Unis visant à éviter une crise humanitaire.

Liberté d’expression et de réunion

Après avoir reçu des menaces d’une source inconnue, un journaliste qui avait travaillé sur la corruption à l’Assemblée nationale a fui le pays en février, alors qu’il se trouvait en liberté conditionnelle. Il avait été condamné en 2022 à deux ans d’emprisonnement et à une lourde amende pour diffamation contre le premier vice-président de l’Assemblée nationale.

Un autre journaliste s’est vu interdire l’accès au Parlement en mars, après avoir enquêté sur des défaillances présumées dans la gestion du budget de l’Assemblée nationale.

Un troisième a été arrêté et détenu pendant six jours en mars. Il était accusé de travailler pour un journal considéré comme dissident, alors qu’il avait cessé sa collaboration avec cette publication. En 2021, les autorités avaient bloqué l’accès au site internet du journal.

Pendant la campagne référendaire, les partis d’opposition appartenant au Bloc républicain pour la défense de la Constitution ont organisé une manifestation à Bangui, la capitale, le 14 juillet. Les autorités l’ont interdite en avançant comme motifs la situation en matière de sécurité et le caractère « subversif » de ce rassemblement. Elles ont menacé de « mettre au pas » les personnes qui ne respecteraient pas l’interdiction.

Attaques et homicides illégaux

Selon la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), la situation des droits humains s’est dégradée, notamment du fait des violations et des exactions commises par toutes les parties au conflit. Selon les éléments recueillis par la MINUSCA, au moins 103 exécutions sommaires ont été perpétrées par l’armée centrafricaine et des groupes armés entre février et juin. Au cours de la même période, 13 civils travaillant sur un site minier dans le village de Chingbolo, à 25 kilomètres de Bambari, ont été tués dans une attaque armée. Les autorités ont accusé des membres de la Coalition des patriotes pour le changement, qui ont nié toute responsabilité.

Selon les Nations unies, 75 attaques ont été commises par des groupes armés contre des travailleuses et travailleurs humanitaires ou des biens de l’ONU entre janvier et juin. Au moins 17 centres de santé ont été la cible d’attaques et de pillages dont il y avait des raisons de croire que des groupes armés en étaient responsables.

Au 31 août, 19 civil·e·s, dont 11 enfants, avaient été tués dans 54 attentats à l’explosif, selon les chiffres du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU.

Droit à la vérité, à la justice et à des réparations

La Cour pénale spéciale, une juridiction hybride soutenue par les Nations unies et chargée des enquêtes et des poursuites concernant les crimes de droit international et les autres atteintes graves aux droits humains perpétrées dans le pays depuis 2003, a annoncé au cours de l’année l’arrestation de quatre hommes accusés de crimes de guerre et/ou de crimes contre l’humanité. Il s’agissait d’Abdoulaye Hissène, ancien dirigeant du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique, de Vianney Semndiro, ancien chef des forces armées centrafricaines, et de deux combattants anti-balaka, Philémon Kahena et François Boybanda.

Le 16 juin, la Cour a rendu sa première décision sur les réparations accordées aux victimes dans le procès contre Issa Sallet Adoum, Yaouba Ousman et Mahamat Tahir, membres du groupe armé Retour, réclamation et réhabilitation (3R). Les accusés avaient été déclarés coupables en novembre 2022 de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, commis lors du massacre d’au moins 46 civil·e·s en 2019. En octobre 2023, ils ont été condamnés, à la fois collectivement et individuellement, à verser une indemnisation aux victimes ou à leurs ayants droit.

En août, la chambre d’assises de la Cour pénale spéciale a entendu l’affaire de Kalité Azor et de ses coaccusés, tous membres du groupe armé Rassemblement patriotique pour le renouveau de la Centrafrique. Accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, ils avaient été déférés à la Cour pénale spéciale en mai 2020.

Violences sexuelles ou fondées sur le genre

Le Système de gestion des informations sur la violence basée sur le genre a enregistré entre janvier et mai 5 928 cas de violences sexuelles ou fondées sur le genre. Les viols et autres violences sexuelles représentaient plus de 40 % des cas et 95 % des victimes étaient des femmes et des filles. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a déclaré en août que toutes les heures deux personnes étaient victimes de ce type de violences en République centrafricaine.

En juin, l’ONU a annoncé que son Bureau des services de contrôle interne avait recueilli des preuves de viol mettant en cause 11 casques bleus tanzaniens déployés sur une base temporaire dans l’ouest de la République centrafricaine. Les 60 membres de l’unité à laquelle appartenaient les auteurs présumés ont été confinés sur la base avant d’être rapatriés.

Droit à l’alimentation

D’après les statistiques des Nations unies, quelque 2,4 millions de personnes vivaient dans l’insécurité alimentaire, dont 622 000 étaient en situation d’insécurité alimentaire aiguë du fait du conflit armé, de la hausse des prix et des inondations, entre autres. En novembre, 20 % des 303 millions de dollars des États-Unis qui avaient été octroyés à la République centrafricaine au titre de l’aide humanitaire ont été affectés à la sécurité alimentaire.

Le Comité international de secours a indiqué en avril que la République centrafricaine était de plus en plus exposée aux effets du réchauffement climatique, ce qui constituait une menace pour la sécurité alimentaire.