République centrafricaine. Les victimes demandent justice

La République centrafricaine (RCA) a été le théâtre de  plusieurs conflits depuis 2002. Des milliers de civil·e·s ont été tués, violés ou soumis à d’autres violences terribles. Nombre de ces personnes ont vu leur habitation brûlée ou pillée et ont été forcées à fuir vers des camps pour personnes déplacées.

En effet, la population de la République centrafricaine a été la cible de crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité commis par des groupes armés, l’armée de la République centrafricaine et leurs alliés.

Pire encore,  les auteurs de ces agissements ont rarement été amenés à rendre des comptes pour ces graves crimes.

Des personnes ont continué de vivre tout près de leurs agresseurs, et ont été forcées de vivre dans le traumatisme et la peur d’être la cible de nouvelles violences.

La plupart de ceux qui ont ordonné les pires atrocités ont simplement continué leur vie en toute impunité.

Certains ont même été promus à des postes haut placés au sein du gouvernement.

Nous ne pouvons pas nous reconstruire sans justice.

Les tribunaux de la République centrafricaine ne sont pas en mesure de gérer des crimes d’une telle ampleur. En outre, ils n’ont tenu aucun procès pénal entre début 2020 et avril 2022, en raison, semble-t-il, de la pandémie et du manque de ressources. La Cour pénale internationale est impliquée, mais ne peut prendre en charge que quelques affaires.

Après des recommandations formulées par des organisations de la société civile au forum de Bangui en 2015, la Cour pénale spéciale (CPS) a été créée en République centrafricaine. Ce tribunal hybride, entre un tribunal national et international, a été conçu pour donner davantage de possibilités de rendre justice et de mettre fin à l’impunité. La Cour pénale spéciale a commencé ses travaux le 22 octobre 2018 avec un mandat de cinq ans ; son mandat fut récemment renouvelé pendant cinq ans encore (octobre 2023 – octobre 2028).

Cependant, la CPS a été confrontée à des obstacles et a subi des retards avant de devenir pleinement  opérationnelle. Aujourd’hui, elle rencontre toujours des difficultés à affirmer pleinement son indépendance et à surmonter certaines résistances des autorités centrafricaines et de la MINUSCA liées à des considérations politiques.

Je demande que nos affaires soient traitées, afin que justice soit rendue en mémoire de mon frère qui a été tué.

Les principaux responsables n’ont pas encore été arrêtés ou poursuivis en justice.

La CPS a émis certains mandats d’arrêt, mais la police centrafricaine et la mission de maintien de la paix de l’ONU, la MINUSCA, n’ont pas encore arrêté les personnes concernées (à l’exception d’Idriss Ibrahim Issa, arrêté en juillet 2022).

En effet, les forces de maintien de la paix et les autorités centrafricaines font souvent face à de graves difficultés, notamment pour localiser les personnes ou les arrêter dans des régions dangereuses ou inaccessibles. Cependant, certaines personnes ont semble-t-il bénéficié d’une protection politique.

La gendarmerie centrafricaine est notamment intervenue, sans autorisation d’un juge, pour libérer un ministre du gouvernement, ancien chef rebelle, qui avait été arrêté et placé en détention provisoire sur ordres de la CPS.

Écoutez les récits des victimes et leurs demandes de justice

Les victimes de ces crimes méritent d’obtenir justice. Ces personnes ne peuvent pas aller de l’avant tant que les responsables de leurs pires souffrances sont libres. Le pays ne peut pas se remettre et aller de l’avant tant que des réparations n’auront pas été accordées. Mais cela requiert une action de nous toutes et tous, afin de montrer que nous nous préoccupons de la situation.

DEMANDEZ JUSTICE POUR LES VICTIMES

Agissez dès maintenant

Joignez-vous à Amnesty pour faire entendre les voix des victimes et soutenir leur quête de justice. Appelons les autorités de la République centrafricaine et leurs partenaires à faire tout leur possible pour honorer leurs engagements en faveur de la justice.

Le gouvernement de la République centrafricaine, l’ONU, les États partenaires de la République centrafricaine et les donateurs doivent à tout prix :

  1. Veiller au financement suffisant de la Cour pénale spéciale, afin qu’elle puisse poursuivre son travail en faveur de la justice ;
  1. Procéder, faire pression en faveur de ou aider à l’arrestation de tous les suspects faisant l’objet de mandats d’arrêt  ;

Et appelons les autorités judiciaires de la République centrafricaine à amener les responsables à rendre des comptes, notamment en :

  1. Veillant à ce que les enquêtes et poursuites engagées par la CPS visent les principaux responsables présumés des crimes les plus graves, indépendamment de leur statut politique, social ou militaire ;
  1. Veillant à ce que les procès devant la CPS respectent les normes d’équité des procès, notamment par l’organisation régulière de séances devant des tribunaux de droit commun de la République centrafricaine.