Dans la bande de Gaza, les tactiques militaires des deux parties mettent en danger les civils

Amnesty International a déclaré ce mercredi 7 janvier que les soldats israéliens et les combattants palestiniens mettaient en danger la vie des civils palestiniens, notamment en les utilisant comme boucliers humains.

« Nos sources à Gaza ont indiqué que des soldats israéliens étaient entrés et avaient pris position dans plusieurs maisons palestiniennes en contraignant les familles à rester au rez-de-chaussée pendant qu’ils utilisaient le reste de leur maison comme base militaire et poste pour leurs tireurs embusqués, a déclaré Malcolm Smart, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International. Cette pratique accroît de toute évidence les risques pour ces familles palestiniennes et signifie de fait qu’elles sont utilisées comme boucliers humains. »

Les soldats israéliens et les tireurs palestiniens continuent d’échanger des tirs dans des endroits proches de bâtiments où habitent des civils, ce qui met ces derniers en danger.

Les forces israéliennes ont bombardé des habitations et d’autres bâtiments civils, en invoquant le fait qu’ils servaient de couverture à des hommes armés tirant sur des cibles israéliennes, alors qu’en général les tireurs palestiniens quittent immédiatement les zones depuis lesquelles ils ont tiré.

« L’armée israélienne sait que les tireurs palestiniens ont l’habitude de se déplacer après avoir tiré et que toute attaque de représailles contre ces habitations portera atteinte dans la plupart des cas aux civils et non pas aux tireurs. »

« Les combattants des deux parties au conflit ne devraient pas attaquer depuis des endroits où se trouvent des civils ; cependant lorsqu’ils se cachent derrière une construction civile pour tirer, cela ne fait pas de ce bâtiment ni des civils qui y habitent une cible militaire légitime. De telles attaques sont illégales », a déclaré Malcolm Smart.

« L’utilisation de telles tactiques alors que les confrontations armées ont lieu dans la rue en plein milieu de zones résidentielles densément peuplées montrent que les deux parties ne respectent pas le statut de personnes protégées qui est celui des civils dans un conflit armé, a ajouté Malcolm Smart. Elle met également en évidence la nécessité d’une enquête indépendante sur les allégations de violations –  y compris peut-être de crimes de guerre – commises par les deux parties et dont les auteurs devront être tenus de rendre des comptes. »

Complément d’information
À la suite de l’attaque dont a été la cible mardi 6 janvier une école de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) dans le camp de réfugiés de Jabaliya, des porte-parole du gouvernement israélien ont déclaré que leurs forces avait visé l’école parce que des hommes armés palestiniens avaient tiré dans leur direction, mais cette explication est controversée. Ce tir d’artillerie, qui a tué une quarantaine de Palestiniens, dont des enfants, et en a blessé plus d’une cinquantaine d’autres, représente de toute évidence une attaque disproportionnée.

Des soldats israéliens ont déjà fréquemment par le passé pris possession de maisons palestiniennes pour s’en servir comme postes d’observation et de tir, emprisonnant de ce fait leurs habitants. Dans d’autres cas, ils ont contraint des civils palestiniens, qu’ils tenaient en joue, à marcher devant eux pour pénétrer dans des bâtiments depuis lesquels ils craignaient d’être attaqués.

La pratique consistant pour les soldats israéliens à s’emparer des habitations de civils palestiniens et à utiliser leurs habitants comme boucliers humains et ces bâtiments comme postes de tir a été fréquemment utilisée ces huit dernières années par l’armée israélienne dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Lors d’une précédente incursion dans la bande de Gaza en mars 2008, des soldats israéliens se sont emparé d’au moins trois maisons dans le nord du territoire et, en février 2008, des soldats ont pris possession d’une autre maison dans le village de Beit Ummar, près d’Hébron, en Cisjordanie.

Des familles palestiniennes prises dans les combats en cours dans la bande de Gaza ont indiqué que dans certains cas des tireurs palestiniens avaient accepté de quitter des postes situés près d’habitations de civils et de ne pas tirer en direction des forces israéliennes, lorsque des habitants s’étaient opposés à leur présence. Dans d’autres cas, ils n’ont pas tenu compte des demandes des habitants et n’ont quitté les lieux qu’après avoir tiré. Dans d’autres cas encore, des habitants ont dit qu’ils avaient eu trop peur pour oser demander aux tireurs de partir.

L’utilisation de « boucliers humains » est interdite aux termes de l’article 28 de la Quatrième Convention de Genève, aux termes duquel « aucune personne protégée ne pourra être utilisée pour mettre, par sa présence, certains points ou certaines régions à l’abri des opérations militaires ». Israël a ratifié la Convention, qui est également reconnue comme reflétant le droit international coutumier et qui a, de ce fait, un caractère contraignant pour Israël, le Hamas et les autres groupes armés palestiniens. Dans un commentaire accompagnant l’article, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a défini la portée de cette disposition de la manière suivante : « L’interdiction, stipulée de façon absolue, s’applique aussi bien aux territoires nationaux des belligérants qu’aux territoires occupés, à des sites restreints qu’à des zones étendues ». L’interdiction de recourir à des boucliers humains est davantage précisé dans l’article 51-7 du Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux. Cet article dispose que « les Parties au conflit ne doivent pas diriger les mouvements de la population civile ou des personnes civiles pour tenter de mettre des objectifs militaires à l’abri des attaques ou de couvrir des opérations militaires ».