Amnesty International a rendu publiques ce 30 septembre des informations sur les attaques brutales commises par les forces de sécurité en Guinée lors d’une opération de répression lancée contre un rassemblement de masse ayant eu lieu le 28 septembre à Conakry, ainsi que sur le degré de préméditation de ces violences.
Des témoins ont dit à l’organisation de défense des droits humains que plusieurs femmes avaient été violées en public par des soldats, dont des « bérets rouges » – qui composent la garde présidentielle. Certaines sources ont indiqué à Amnesty International que de nombreuses victimes ont été tuées par les forces de sécurité guinéennes qui, clairement, « tiraient pour tuer ».
Un des témoins a déclaré à Amnesty International : « J’ai vu des corps touchés au thorax et à la tête, certains ont reçu des balles dans le dos. Beaucoup ont été touchés à bout portant. »
L’une des manifestantes a raconté à l’organisation : « Les militaires ont déchiré les pagnes des femmes, elles étaient toutes nues. Ils les frappaient avec des matraques et des kalachnikovs. J’ai vu deux militaires qui avaient mis une femme par terre, la violaient publiquement devant les manifestants, j’ai pris peur. J’ai vu un militaire qui introduisait une matraque dans le sexe d’une femme qui était toute nue. » Un autre témoin a ajouté qu’un militaire avait versé de la bière sur une femme qu’il venait de violer.
D’après les déclarations de plusieurs témoins oculaires recueillies par Amnesty International, ces attaques avaient été organisées par des responsables militaires. Des témoins ont ainsi indiqué que plusieurs membres de la garde présidentielle étaient présents et supervisaient les opérations de répression. L’un d’entre eux a dit à Amnesty International que ces responsables « pointaient leur doigt en direction des manifestants et criaient : “Abattez-les.” »
Par ailleurs, plusieurs témoins ont fait état de la présence parmi les forces de sécurité d’un ministre en exercice.
Une personne a décrit une scène d’exécution extrajudiciaire à Amnesty International : « un jeune âgé d’environ dix-huit ans, portant un tee-shirt Lacoste et un jean bleu est tombé, des gens l’ont piétiné, il essayait de se relever, il tapait le sol et bougeait sa tête. Un militaire a demandé de le “terminer”, un autre militaire a sorti un poignard et a égorgé le jeune. »
Amnesty International appelle de ses vœux l’établissement d’une commission d’enquête internationale afin de faire la lumière sur les violations des droits humains perpétrées à Conakry.
L’organisation a également demandé la cessation immédiate de tout approvisionnement du gouvernement guinéen en matériels de sécurité et de police susceptibles d’être utilisés afin de commettre des violations graves des droits humains et ce, tant que le gouvernement guinéen n’aura pas mis en place des mesures concrètes visant à empêcher les forces de sécurité de commettre de tels abus et à traduire en justice les responsables de ces actes.
Un manifestant a déclaré à Amnesty International : « La foule avait déjà envahi le stade. Les gens étaient massés sur les gradins. Des militaires dont des “bérets rouges”, des gendarmes et des policiers ont d’abord encerclé le stade, puis les forces de sécurité ont pénétré à l’intérieur par petits groupes. Ils ont alors tiré des grenades lacrymogènes et à peine dix minutes après, ils ont tiré à balles réelles sur les manifestants en visant prioritairement ceux qui étaient devant eux, sur la pelouse. »
Amnesty International a par ailleurs appris qu’un certain nombre de personnes, y compris des femmes, ont été arrêtées au cours de cette manifestation et seraient toujours entre les mains des forces de sécurité. L’organisation craint que ces détenus ne soient soumis à des mauvais traitements.
« Il faut identifier les auteurs de ces attaques brutales et les traduire en justice, a déclaré Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International. Cela ne peut être accompli qu’au moyen d’une enquête internationale, les autorités guinéennes ayant déjà perdu toute crédibilité en ne faisant pas preuve de la volonté politique requise quand il aurait fallu mener une enquête nationale sur des violations des droits humains imputées aux forces de sécurité en 2007. »