La condamnation et l’incarcération du gouverneur de Djakarta, Basuki Tjahaja Purnama, plus connu sous le nom d’« Ahok », va ternir la réputation de tolérance de l’Indonésie, a déclaré Amnesty International le mardi 9 mai.
« Cette décision de justice montre l’iniquité fondamentale de la législation indonésienne sur le blasphème, qui doit être abrogée immédiatement », a déclaré Champa Patel, directrice du bureau régional Asie du Sud-Est et Pacifique d’Amnesty International.
« Bien qu’Ahok clame son innocence et que des éléments prouvent que ses propos ont été manipulés à des fins politiques, il a été condamné à deux ans de prison. Ce jugement va ternir l’image de nation tolérante dont bénéficie l’Indonésie »
Amnesty International appelle les autorités indonésiennes à abroger les dispositions législatives relatives au blasphème, notamment les articles 156 et 156(a) du Code pénal, qui ont été utilisés pour poursuivre des personnes et les emprisonner. En Indonésie, des personnes peuvent être incarcérées jusqu’à cinq ans pour « diffamation » à l’égard de la religion, simplement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits aux libertés d’expression, de pensée, de conscience ou de religion, qui sont protégés par le droit international relatif aux droits humains.
Complément d’information
Le ministère public a appelé les juges à condamner Ahok à une peine d’un an d’emprisonnement assortie de deux ans de mise à l’épreuve, l’a accusé d’« outrage ou incitation à des sentiments d’hostilité » en public envers un groupe donné au titre de l’article 156 du Code pénal, et a abandonné les charges de blasphème. Cependant, le tribunal de district de Djakarta-Nord a déclaré Ahok coupable de blasphème en vertu de l’Article 156(a) du Code pénal et l’a condamné à deux ans de prison. Ahok est actuellement incarcéré dans la prison de Cipinang.
Bien que la Loi sur le blasphème (décret présidentiel n° 1/PNPS/1965) et l’article 156(a) du Code pénal aient été promulgués en 1965, ils n’ont été utilisés pour poursuivre qu’une dizaine de personnes entre 1965 et 1998, lorsque l’ancien président Suharto était au pouvoir, période pendant laquelle l’exercice du droit à la liberté d’expression était pourtant soumis à de fortes restrictions. Entre 2005 et 2014, selon les informations recueillies par Amnesty International, au moins 106 personnes ont été poursuivies et condamnées au titre de la législation relative au blasphème.