Jordanie. Les autorités doivent libérer le journaliste Ahmad Hassan al Zoubi emprisonné pour des messages publiés sur les réseaux sociaux

Les autorités jordaniennes doivent libérer immédiatement le journaliste reconnu Ahmad Hassan al Zoubi, arrêté le 2 juillet par les forces de sécurité en application d’une décision de justice rendue il y a un an, qui l’a condamné à un an de prison en raison d’un message publié sur Facebook dans lequel il critiquait le pouvoir, a déclaré Amnesty International le 5 juillet 2024.

Selon les documents judiciaires examinés par Amnesty International, le tribunal de première instance a initialement condamné Ahmad Hassan al Zoubi à deux mois de prison et à une amende le 22 juin 2023 pour un message publié sur Facebook, dans lequel il critiquait la réponse des autorités aux grèves des transports dans le gouvernorat de Ma’an, dans le sud du pays. Il a été déclaré coupable aux termes de l’article 150 du Code pénal et de l’article 15 de la précédente Loi sur la cybercriminalité pour « incitation à la discorde ».

« Nul ne devrait être emprisonné simplement pour avoir critiqué les autorités sur les réseaux sociaux. La détention d’Ahmad Hassan al Zoubi s’inscrit dans le cadre d’une répression généralisée de la dissidence en Jordanie, qui a ciblé depuis quelques mois des centaines de personnes. Outre son arrestation et sa condamnation arbitraires, il risque un procès inique pour des accusations qui ne sont pas des infractions reconnues par le droit international, a déclaré Aya Majzoub, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Les autorités jordaniennes doivent relâcher immédiatement et sans condition Ahmad Hassan al Zoubi et annuler sa condamnation. Par ailleurs, elles doivent modifier les dispositions vagues et trop générales des textes de loi, comme la nouvelle Loi relative à la cybercriminalité, qui servent à criminaliser la liberté d’expression. »

Le parquet a fait appel de la condamnation prononcée contre Ahmad Hassan al Zoubi, le 27 juillet 2023, et la cour d’appel a durci la sentence : un an d’emprisonnement et une amende de 200 dinars jordaniens (environ 260 euros). Cependant, Ahmad Hassan al Zoubi n’avait pas été placé en détention jusqu’à présent.

Selon son avocat, le parquet s’est uniquement basé sur sa publication Facebook pour le déclarer coupable d’« incitation à la discorde » et a fait référence à la section des commentaires de ce message public, dans laquelle d’autres personnes ont exprimé des sentiments d’incitation. La cour d’appel a rendu son verdict sans fixer d’audience au tribunal ni permettre à Ahmad Hassan al Zoubi et à son avocat de présenter une défense. En vertu de la législation jordanienne, les délits peuvent faire l’objet d’un seul appel devant la cour d’appel. Cependant, il est possible de déposer une demande d’appel spéciale devant la Cour de cassation à titre exceptionnel. Le ministre de la Justice a refusé trois requêtes déposées par l’avocat d’Ahmad Hassan al Zoubi pour faire appel devant la Cour de cassation en vue d’un jugement final.

Complément d’information

Ahmad Hassan al Zoubi est un journaliste, dramaturge et satiriste reconnu qui écrit pour divers médias jordaniens et régionaux. Il est également le fondateur de Sawaleif, un site d’information jordanien. Son arrestation s’inscrit dans le cadre de la répression qu’exercent les autorités jordaniennes contre les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, en invoquant des dispositions pénales vagues et générales, notamment la Loi relative à la prévention de la criminalité, le Code pénal de 1960 et la Loi relative à la cybercriminalité, récemment modifiée.

Le 12 août 2023, le roi a approuvé la loi modifiée sur la cybercriminalité, réprimant davantage le droit d’exprimer librement ses opinions en ligne. Le texte prévoyait des peines d’emprisonnement plus sévères, avec un minimum de trois mois, et des amendes allant jusqu’à 32 000 dinars jordaniens (42 000 euros). Cette loi modifiée est formulée en des termes qui ne répondent pas aux exigences du droit international, qui impose une formulation très précise des textes juridiques pour permettre à chacun d’adapter son comportement en conséquence.

Depuis la modification de la Loi relative à la cybercriminalité, Amnesty International a constaté une intensification de la répression de la liberté d’expression. Depuis le 7 octobre, des dizaines de manifestants ont été inculpés en vertu de la Loi relative à la cybercriminalité pour des publications sur les réseaux sociaux dans lesquelles ils expriment simplement un sentiment pro-palestinien, critiquent l’accord de paix conclu par les autorités avec Israël ou appellent à manifester sans violence ou à faire grève. Ces personnes ont été accusées en vertu de dispositions comme « incitation à la discorde » et « atteinte à l’unité nationale », qui ne sont pas des infractions prévues par le droit international.