Israël/TPO. Il faut enquêter sur une exécution extrajudiciaire présumée à l’hôpital d’Hébron

L’homicide d’un Palestinien de 28 ans par les forces israéliennes lors d’une descente effectuée à l’hôpital al Ahli à Hébron aux premières heures du 12 novembre s’apparente à une exécution extrajudiciaire, a déclaré Amnesty International jeudi 12 novembre 2015.

Selon des témoins, un groupe de soldats et de policiers israéliens ont fait irruption à l’hôpital à 2h43 du matin habillés en civils palestiniens, certains portant des keffiehs et de fausses barbes, un autre se faisant pousser sur un fauteuil roulant, déguisé en femme enceinte. Selon deux témoins avec lesquels Amnesty International s’est entretenue, ils sont entrés dans une chambre au troisième étage de l’hôpital pour arrêter Azzam Azmi Shalaldah, 20 ans, soupçonné d’avoir poignardé un civil israélien le 25 octobre.

Lorsqu’ils sont entrés dans la chambre, le patient était dans son lit ; ils ont immédiatement tiré sur son cousin Abdullah Azzam Shalaldah, à trois reprises au moins, dans la tête et le haut du corps.

« Le fait qu’Abdullah Shalaldah a été touché à la tête et dans le haut du corps laisse à penser qu’il s’agissait d’une exécution extrajudiciaire. Cet épisode vient s’ajouter à une série d’actes similaires imputables aux forces israéliennes en Cisjordanie, qui requièrent des investigations immédiates, a déclaré Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient à Amnesty International.

Le fait qu’Abdullah Shalaldah a été touché à la tête et dans le haut du corps laisse à penser qu’il s’agissait d’une exécution extrajudiciaire. Cet épisode vient s’ajouter à une série d’actes similaires imputables aux forces israéliennes en Cisjordanie, qui requièrent des investigations immédiates.

Philip Luther, directeur du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient à Amnesty International.

« Les forces israéliennes doivent cesser d’utiliser intentionnellement la force létale contre des personnes qui ne représentent pas une menace imminente pour la vie. »

Un témoin a déclaré qu’Abdullah Shalaldah, qui tenait compagnie à son cousin à l’hôpital et dormait dans la chambre, s’était rendu à la salle de bains et venait d’en sortir lorsque les forces israéliennes ont fait irruption et l’ont abattu. Elles ont alors menacé un autre patient à bout portant, menotté un autre proche à un lit et ont quitté l’hôpital en emmenant Azzam Shalaldah sur un fauteuil roulant.

Les assassinats illégaux et délibérés, perpétrés sur ordre de responsables du gouvernement ou de l’armée, ou avec leur complicité ou leur consentement, ne sont autres que des exécutions extrajudiciaires, qui sont prohibées en toutes circonstances et constituent des crimes au regard du droit international.

L’armée israélienne a publié une déclaration affirmant qu’Abdullah Shalaldah avait attaqué les forces israéliennes, mais sans préciser s’il était armé. Selon des témoins, il ne l’était pas ; il se trouvait à quelques mètres des soldats et des policiers et n’a pas tenté de les attaquer. Rien n’a été fait pour l’arrêter, selon les témoins, ni pour utiliser des alternatives non létales avant de l’abattre.

L’homicide d’Abdullah Shalaldah s’inscrit dans une série d’homicides commis par les forces israéliennes qui, selon Amnesty International, sont illégaux. Depuis début octobre, on observe une forte hausse du nombre d’attaques perpétrées par des Palestiniens contre des civils, des policiers et des soldats israéliens. Les attaques contre des civils ne sont jamais justifiées. Cependant, les forces israéliennes réagissent dans de nombreux cas en recourant délibérément à la force létale alors que ce n’est pas justifié. Les propres règles de l’armée israélienne autorisent les soldats en Cisjordanie occupée à ouvrir le feu uniquement lorsque leur vie est en danger imminent. Il semble que ce n’était pas le cas lorsqu’ils ont tiré sur Abdullah Shalaldah, qui n’était pas armé.

Les forces israéliennes ont tué au moins 18 Palestiniens dans la ville d’Hébron et alentour ces dernières semaines, notamment dans le cadre d’exécutions extrajudiciaires présumées, qui doivent faire l’objet dans les meilleurs délais d’investigations approfondies et impartiales, en vue d’engager des poursuites pour des infractions prévues par la loi.

Le 6 novembre, les forces israéliennes ont abattu Tharwat al Sharawi, 72 ans, et déclaré qu’elle avait l’intention de les percuter avec sa voiture. Dans une vidéo, on peut voir la voiture qu’elle conduisait se diriger vers les soldats assez lentement pour qu’ils puissent s’écarter et se mettre à tirer sur le véhicule. Le fils de Tharwat al Sharawi a déclaré que sa mère se rendait à un déjeuner lorsqu’elle a été tuée. Même si Tharwat al Sharawi avait l’intention de les percuter, l’armée a elle-même reconnu que les soldats n’ont tiré qu’après s’être écartés de la trajectoire du véhicule. Ils n’étaient donc plus en danger imminent et le recours à la force meurtrière était illégal.

Le 29 octobre, Mahdi al Muhtasib, 23 ans, a été abattu par les forces israéliennes après qu’il aurait légèrement blessé un soldat israélien dans le cadre d’une attaque à l’arme blanche, à Hébron. Sur une vidéo, on peut voir Mahdi al Muhtasib se tordre de douleur par terre devant un soldat israélien, qui se tient à quelques mètres de distance et lui tire une nouvelle fois dessus. Cette vidéo montre que Mahdi al Muhtasib était manifestement blessé, et ne représentait plus aucune menace pour ce soldat. En outre, tirer sur un blessé constitue un homicide délibéré et une grave atteinte à la Quatrième Convention de Genève.

« Les forces israéliennes ont par le passé commis des homicides illégaux dans les territoires palestiniens occupés, dont des exécutions extrajudiciaires, a déclaré Philip Luther.

« Si le nombre d’attaques de Palestiniens contre des civils, des soldats et des policiers israéliens a fortement augmenté depuis début octobre, cela ne saurait excuser le recours à la force meurtrière par des soldats et des policiers israéliens lorsqu’il n’est pas justifié. »